Nous avons souhaité aborder la question urbaine en Afrique noire, car ces villes se développent principalement sur le modèle de l’auto-planification et de l’auto-construction. L’ampleur du phénomène est tel, que la situation est unique au monde. Par ailleurs, la population urbaine, sur ce continent, pourrait tripler en 40 ans pour passer de 400 millions à 1,2 milliard d’habitants. Pour comparer, la population de la France a seulement doublé depuis la Révolution française. Ainsi, nous avons cherché à observer ce qui rassemble ces villes, à cerner leurs identités, leurs modes de développement, à identifier les acteurs qui les construisent, par-delà le bien et le mal. Nous avons également placé au centre de nos interrogations la question du fonctionnement. Sont-elles efficientes ? Quels sont les bons critères pour les analyser ? Qu’est ce que les africains ont inventé d’intéressant ? Y a t-il une spécificité africaine ? Quels sont les problèmes ? Ou encore, la ville africaine serait-elle la cité jardin idéale ? Aurait-elle la forme urbaine qui génère le plus de sociabilité ? L’Afrique subsaharienne est un continent homogène culturellement, mais multiple. Ainsi, l’histoire, le niveau de développement, la vie sociale, la richesse de villes comme Mombasa ou Lagos sont différents. Mombasa, principal port du Kenya est une ville plusieurs fois millénaire orientée sur le monde Arabe, l’Inde, l’Asie. Lagos, la ville aux vingt milliardaires, est orientée vers les Etats-Unis et rêve de devenir le New York africain. Elle est la capitale économique du Nigéria et la plus grande ville d’Afrique subsaharienne, nourrie aux pétrodollars et portée par un marché intérieur de 170 millions d’habitants. Ceci étant, nous constatons assez distinctement que les villes africaines ne répondent pas aux critères classiques de la modernité, c’est à dire en se développant parallèlement au secteur industriel et en produisant des quartiers thématisés. Elles inventent un modèle urbain d’un nouveau genre, d’une alter-modernité, où l’auto-gestion y joue un grand rôle - car l’État est peu présent - où la vie sociale est riche, où le village urbain est le modèle dominant, où la rue est très vivante. Ainsi, les échanges se passent très souvent dehors,